
Entretien avec Frère Jesús Etayo
- 29 mars 2013
Frère Jesús Etayo, Supérieur général de l’Ordre hospitalier de Saint Jean de Dieu, était présent en Inde du 19 au 24 mars 2013, à l’occasion de l’inauguration de 3 nouveaux établissements Saint Jean de Dieu. A l’issue de ce voyage, il répond à nos questions.
Quelles sont vos impressions après ce voyage intense en rencontres et en événements ?
Je suis venu pour inaugurer plusieurs établissements, dont une maison pour personnes âgées et handicapées pauvres, un centre pour malades psychiatriques et une résidence longue durée pour handicapés mentaux. J’ai particulièrement été impressionné par la qualité de ces établissements modernes qui sont le signe que l’Ordre se développe en Inde. Je me réjouis de voir que, petit à petit, cette province qui n’est encore que très jeune, grandit au rythme des besoins du pays en terme de soin et d’accueil des plus pauvres auxquels les frères sont attentifs.
L’un des signes particuliers de cette croissance, est la collaboration entre les provinces d’Europe et les frères d’Inde…
Oui, je pense que la collaboration entre les provinces d’Europe et plus particulièrement entre celles d’Allemagne et d’Autriche avec l’Inde, a toujours été importante. C’est le signe de ce que, dans l’Ordre, depuis de nombreuses années, nous essayons de mettre en avant : partager entre les provinces tant de possibilités qui nous sont offertes aujourd’hui par un monde globalisé. Cette collaboration se situe souvent, il est vrai, sur le plan financier, mais pas uniquement. Il est bon de souligner tout ce que ces échanges permettent au niveau des idées, des ressources humaines, etc. L’Ordre a tant de potentiels que quand nous travaillons ensemble, quand nous arrivons à créer une synergie entre provinces ou établissements, nous favorisons l’innovation et la création.
On a parfois l’impression qu’une telle collaboration est à sens unique, des provinces riches vers les provinces pauvres…
Cette collaboration est toujours nécessairement réciproque. On parle en effet souvent de collaboration économique de l’Europe vers les pays de mission… Ce qui est vrai car, jusqu’à maintenant, c’est sûr, les provinces d’Europe ont beaucoup aidé les autres provinces pauvres au niveau financier. Mais nous vivons maintenant une crise. Ces aides continueront évidemment, dans la mesure du possible, mais je reste persuadé qu’elles ne seront qu’un avantage parmi d’autres, hérités directement de ces échanges, dans le sens où les provinces qui ont davantage de besoins économiques, comme l’Inde ou l’Afrique, nous donnent à leur tour tellement de choses. Dont la possibilité de les aider, d’ailleurs ! Mais aussi la possibilité de vivre des expériences très riches entre frères et collaborateurs de pays différents. Ils nous donnent aussi la possibilité de nous faire comprendre les valeurs à travers leurs cultures, qui ont souvent tant à nous dire à nous européens et pays occidentaux. C’est une notion que nous devons toujours davantage développer au sein de l’Ordre.
Je peux dire que quand je rencontre des frères ou des collaborateurs qui font des expériences d’échange, comme le fait de partir plusieurs mois pour aider dans une autre province en apportant ses propres compétences, ceux qui apportent l’aide sont très souvent ceux qui reviennent les plus transformés !
A l’occasion de votre séjour en Inde, vous avez eu l’occasion, avec Frère Elia Tripaldi, postulateur de l’Ordre, d’aborder la question du procès de béatification de Frère Fortunatus Tanhaüser, le frère allemand fondateur de la province de l’Inde. Qu’en est-il ?
Frère Fortunatus a été une grande figure, notamment en Inde. Avec d’autres confrères, il a été protagoniste du retour de l’Ordre en Inde (qui y était déjà aux 17, 18 et 19ème siècles avec des frères portugais). Il a été capable non seulement d’y retourner, mais aussi de développer sur place l’Ordre, son charisme et sa mission. Aujourd’hui, et j’ai pu le toucher du doigt pendant ces quelques jours, il est l’objet d’une grande dévotion en Inde, à tel point que certains le considèrent déjà comme saint ! C’est pourquoi nous étudions la possibilité d’ouvrir un procès de béatification.Pour cela, nous avons profité du voyage pour rencontrer l’évêque du lieu, puisque c’est dans son diocèse que devra s’ouvrir la première phase de ce long processus.
Frère Jesús, vous allez bientôt venir en France à l’occasion de la visite canonique qui sera effectuée par Frère Giampietro Luzzato, l’un de vos conseillers, du 5 juin au 14 juillet. Comment se prépare une telle visite ?
Une visite canonique est un moment important pour se retrouver, c’est notamment un signe d’universalité qui permet de mieux se connaître, entre la curie générale et une province. C’est un moment important qu’il ne faut pas tant voir comme une visite administrative que comme une visite pastorale sous le signe de la fraternité et de l’hospitalité. Frères et collaborateurs doivent s’y préparer en y voyant une opportunité, un moment de grâce, un temps spirituel. Demandons à l’Esprit-Saint de nous guider dans cette évaluation de la mission et du charisme de l’Ordre dans la province de France. Nous pourrons ainsi voir ce que nous pouvons améliorer dans le futur pour que cette mission d’hospitalité soit toujours plus vivante dans notre service aux plus petits.