Urgence Ebola : lettre aux provinces espagnoles

Très Chers Frères Provinciaux,

Membres de la Famille Hospitalière Saint Jean de Dieu en Espagne,

Au nom des Frères et Collaborateurs de la Province Saint Jean-Baptiste de France, je viens vous assurer de notre vive émotion et de notre profonde sollicitude suite aux décès de nos confrères Patrick, George et Miguel et de S?ur Chantal-Pascaline, sans oublier les collaborateurs de la communauté Saint Jean de Dieu de Monrovia au Libéria.

 

Parmi ces « martyrs » de l’Hospitalité, le prénom d’un des trois frères nous était devenu quelque peu familier en Europe puisque, suite à son rapatriement sanitaire, Frère Miguel Parajes faisait la Une de nos médias au sujet du virus Ebola. Peut-être aura-t-il fallu ce retour, aussi cruel qu’il dût être à vivre pour la communauté de Monrovia, pour qu’enfin l’Europe prenne conscience de la tragédie que nos frères et s?urs d’Afrique de l’Ouest sont en train de vivre ?

 

J’imagine les sentiments qui ont pu habiter Frère Miguel lorsque, quittant sa communauté d’appartenance pour recevoir des soins plus appropriés en Espagne, il disait aussi « A-Dieu » dans son c?ur à ceux et celles qui, avec lui, s’étaient donnés sans compter, oublieux d’eux-mêmes et au nom de leurs foi et engagement, à la cause du peuple africain affligé.

 

Vos provinces, chers Frères d’Espagne, ont déjà donné beaucoup de martyrs à l’Ordre, à l’Eglise et au monde. Je pense bien sûr à nos bienheureux Frères morts au cours de la guerre civile espagnole. Plusieurs récits de leur martyre relatent que, pour beaucoup d’entre eux, alors qu’ils auraient pu fuir, sont restés fidèles à leur v?u d’hospitalité en demeurant auprès de leurs chers malades jusqu’au moment où la vie leur fut ôtée.

 

La mort de Frère Miguel, et avec lui celle de nos frères Patrick et Georges, nous invite à une relecture actualisée de l’histoire de notre Ordre et nous provoque chacun personnellement dans cet engagement identique au leur que nous avons pris, à la suite du Christ et de Saint Jean de Dieu. Par leur mort, nous sommes tous questionnés dans notre fidélité à notre consécration, dans notre passion pour l’hospitalité, dans notre amour pour les malades et les nécessiteux.

 

« A les voir si pauvres et si mal soignés, j’ai eu le c?ur brisé, ‘ je leur ai porté secours comme j’ai pu, mais non pas autant que je l’aurais désiré. » Cette réflexion de notre Père Saint Jean de Dieu dans sa 1ère lettre à la Duchesse de Sessa, combien de fois nos frères ont-ils dû l’avoir devant l’ampleur de cette catastrophe humanitaire qu’est Ebola ? Et à présent nous pouvons la faire nôtre, puisqu’il s’agit de nous interroger sur « comment poursuivre cette mission d’hospitalité à haut risque ? »

 

Je sais, chers Frères que vous y réfléchissez. Aussi, je voudrais vous assurer de nos prières, de notre grande affection dans le Seigneur et de notre proximité dans cette situation d’épreuve, de doute mais aussi de volonté de poursuivre qui est la vôtre.

 

En France, à la mesure de nos moyens, nous faisons le maximum pour sensibiliser l’opinion publique à cette tragédie, pour recueillir des fonds, pour vous soutenir et vous exprimer notre fraternelle amitié.

Monseigneur Bernard Podvin, Secrétaire de la Conférence des évêques de France m’a téléphoné aujourd’hui pour mettre à notre disposition, en cas de besoin, leurs moyens de communication. Il m’a aussi chargé de vous dire, au nom de l’épiscopat français, toute l’estime et l’admiration qu’il porte aux Frères Hospitaliers de saint Jean de Dieu et à leur si beau charisme d’Hospitalité.

 

Avec les Frères et Collaborateurs de la Province saint Jean-Baptiste de France, je vous assure de nos encouragements, pleinement unis à vous tous en Saint Jean de Dieu notre Père.

 

                                Frère Alain-Samuel Jeancler

                                Supérieur provincial