
Qui est saint Jean de Dieu ?
- 10 mars 2016
Alors que les communautés et établissements Saint Jean de Dieu du monde entier célèbrent leur fondateur ces jours-ci, nous vous proposons ici un bref rappel de l’histoire du patron des malades et du personnel soignant, par Mgr Jean-Marc Aveline, qui a présidé la fête de saint Jean de Dieu au CHRS Forbin, le 9 mars dernier.
Né le 8 mars 1495 dans une petite ville du Portugal, Montemor-o-Novo, au diocèse d’Evora, saint Jean de Dieu a très vite connu l’errance et la précarité, dès l’âge de huit ans. Sa vie a été plus que mouvementée et il avait déjà beaucoup « galéré », comme on dit aujourd’hui, lorsqu’il se rendit compte que les propriétaires fermiers chez qui il travaillait dans la campagne espagnole, soignaient mieux leur bétail que leurs ouvriers, et que les chevaux étaient propres et bien portants alors que les pauvres étaient faibles, nus et maltraités. Et peu à peu il résolut d’aider les pauvres en leur offrant ce bien si précieux qu’est l’hospitalité.
Mais il lui fallut encore des années, entre Gibraltar, Ceuta et Grenade, pour donner corps à cette intuition. L’Ordre hospitalier fut fondé à Grenade en 1537, après bien des vicissitudes.
Saint Jean de Dieu, ce n’est pas un riche qui fonde pour des pauvres, c’est un pauvre qui a partagé la misère de son temps, qui a été lui-même considéré comme un fou et interné dans un asile, qui a vécu de petits boulots et longtemps cherché sa voie, c’est un homme qui ne demandait pas de loin : « qui est mon prochain », mais qui peu à peu s’est fait lui-même le prochain des pauvres de son temps et qui mourut d’épuisement un autre 8 mars, en 1550, à l’âge de 55 ans.
Mais la petite graine semée par ce fou de Dieu finira par germer et donner de grands fruits, notamment en Espagne, en Italie, puis en France, lorsque Marie de Médicis, l’épouse d’Henri IV, qui avait connu les frères hospitaliers dans sa Florence natale, les fit venir à Paris où ils fondèrent l’hôpital bien nommé « de la charité ». Entre 1602 et 1782, 32 couvents-hôpitaux naîtront ainsi sur le sol du Royaume de France avant d’être supprimés au moment de la Révolution.
Et ce fut Paul de Magallon, dont le père avait été avocat au Parlement de Provence, qui, après la Révolution, entreprendra la renaissance de l’ordre des hospitaliers de saint Jean de Dieu. Lui aussi avait connu un parcours chaotique. Il avait combattu dans l’armée napoléonienne, en Espagne, en Pologne et en Russie. Après la chute de l’Empereur, au printemps 1819, Paul de Magallon est à Marseille, car son frère aîné commande le Fort Saint-Nicolas. Et un matin, en descendant de Notre-Dame de la Garde où il se rendait tous les jours, il voit deux jeunes hommes mendier de la nourriture et la porter aux pauvres et aux malades de l’Hôtel Dieu.
Et c’est ainsi que va renaître, grâce à la générosité de jeunes marseillais, l’Ordre hospitalier de Saint Jean de Dieu en France. Paul de Magallon, qui deviendra Frère Jean de Dieu, fondera plusieurs hôpitaux psychiatriques en France, notamment à Paris et à Dinan, et à Marseille l’hospice de Saint-Barthélemy. Et quelques décennies plus tard, en 1872, un commerçant marseillais, François Massabo, décide de venir en aide à ceux que les épreuves de la vie ont jeté à la rue et fonde à la rue de Forbin le premier accueil de nuit d’Europe, qui servira d’exemple à des dizaine d’autres initiatives en faveur des sans-abri. Soucieux de pérenniser son ?uvre, Massabo choisit de la confier aux Frères de Saint Jean de Dieu en 1897 qui la développent depuis lors en fidélité au charisme de leur fondateur.
Il est important, chers amis, de se souvenir de tout cela ! Car nous comprenons mieux que la parabole du Bon Samaritain n’est pas qu’une jolie petite histoire qui ne nous concernerait que de loin. Si nous le voulons, nous pouvons nous aussi décider de nous faire le prochain des pauvres d’aujourd’hui. Si nous le voulons, nous pouvons nous aussi concrétiser dans notre vie quotidienne ces deux mots de charité et de miséricorde, que le pape François a voulu mettre au c?ur de cette année jubilaire.
‘ Retrouvez l’intégralité de l’homélie de Mgr Jean-Marc Aveline, évêque auxiliaire de Marseille, à l’occasion de la fête de Saint Jean de Dieu au CHRS Forbin, le 9 mars 2016