
Frères quêteurs : l’hospitalité itinérante
- 20 avril 2020
Suivant l’exemple de saint Jean de Dieu, qui criait dans les rues de Grenade “Frères, faites-vous du bien !” pour recueillir des dons, des générations de frères quêteurs ont sillonné les routes de France, malgré les difficultés, pour trouver de quoi subvenir aux besoins de leurs malades.
Une activité indispensable

Si l’histoire a retenu le nom de peu d’entre eux, les frères quêteurs ont eu un rôle fondamental dans le développement de la province de France et de ses établissements. En effet, la quête a longtemps représenté le principal moyen de subsistance pour les frères et leurs malades, notamment au moment de la restauration de la province au début du XIXe siècle.
Sans la détermination de frères comme Jean de Dieu de Magallon, Victor Thévenon, Claude-Marie Gandet et bien d’autres encore, qui quêtaient sans relâche pour nourrir les malades et rembourser les dettes des établissements, beaucoup de maisons auraient sans doute mis très tôt la clé sous la porte.
Un exercice éprouvant

À cette époque, la quête était un exercice éprouvant. Munis de leur petit carnet noir et guidés par les instructions de leur supérieur provincial dans son Règlement pour les religieux envoyés en quête, les frères ne se contenaient pas de demander l’aumône autour de leur hôpital, ils étaient envoyés dans toute la France pendant plusieurs jours, voire plusieurs semaines, voyageant à pied, par tous les temps, été comme hiver, mendiant aussi leur gîte et leur couvert, portant à bout de bras les dons en nature qu’ils recevaient pour les vendre et envoyer l’agent par la poste au couvent.
Les frères quêteurs, pourtant choisis parmi les plus robustes, rentraient parfois de leurs tournées bien affaiblis, malades, à bout de forces. Et leurs épreuves n’étaient pas que physiques : combien de fois, malgré leur douceur, ils voyaient les portes se fermer devant leur main tendue. Il arrivait même que les enfants se moquent d’eux et leur jettent des pierres. Mais peu importe, l’année suivante, ils étaient de retour.
La quête était un moment à part dans la vie religieuse du frère, un moment où, après avoir accueilli les pauvres et les malades à l’hôpital comme religieux infirmier, il devenait lui-même le pauvre qui tendait la main pour être accueilli et expérimentait la charité et l’hospitalité des autres.
Les nombreux fruits de la quête
Cependant, les tournées de quête rapportaient aux frères bien plus que de l’argent. C’est grâce à elles qu’ils ont gagné certaines amitiés fidèles, tissées avec les bienfaiteurs au fil de leurs passages, c’est aussi grâce à elles qu’ils ont gagné de très bons religieux. Car le fils de la famille, impressionné par le discours du quêteur sur l’Ordre et l’action des frères en faveur des pauvres et des malades, venait parfois frapper à la porte du couvent quelques années plus tard pour demander à prendre lui aussi l’habit de saint Jean de Dieu.
Une hospitalité hors les murs
La quête, ce n’était pas seulement prendre l’argent des autres, recueillir des dons pour les malades, c’était un véritable moment de partage, durant lequel les frères donnaient tout au long de leur chemin. Ils donnaient un sourire, une parole d’encouragement ou de consolation, un conseil avisé ou un témoignage édifiant qui marquaient profondément les populations, portant un peu de l’hospitalité de saint Jean de Dieu au-delà de l’enceinte de l’hôpital.