Le Croisic : les murs changent, l’hospitalité demeure

Lorsque l’on pousse la porte d’un établissement Saint Jean de Dieu, ses murs nous racontent une histoire plus que centenaire. Au CMS du Croisic, tout est différent : le site a changé, les bâtiments aussi, de même que les résidents. Près de 130 ans après sa création, que reste-t-il du projet du fondateur ?

Un casino devenu sanatorium

Frère Gaëtan Corriger, fondateur du CMS du Croisic en 1893
(Ordre Hospitalier de Saint Jean de Dieu, Paris)

L’œuvre du Croisic est née de la volonté de Frère Gaëtan Corriger, supérieur de l’établissement de la rue Lecourbe à Paris (actuel CMS Lecourbe). En déambulant dans les couloirs, il constatait avec tristesse que ses infirmeries étaient remplies d’enfants dont l’état de santé pourrait être amélioré s’ils effectuaient un séjour prolongé en bord de mer.

Ainsi, lorsqu’il apprend qu’un ancien hôtel-casino est en vente au Croisic, il se rend sur place : le cadre est parfait, les bâtiments auront besoin d’être adaptés mais quelques réparations seulement suffiraient pour accueillir les premiers enfants. Le casino est donc acheté en mars 1893 et les 35 premiers pensionnaires arrivent en gare du Croisic trois mois plus tard. Leur nombre ne cessera de croître jusqu’à atteindre plus de 300. Et les résultats sont encourageants : si les enfants ne ressortent pas tous guéris de leur séjour croisicais, les bains de mer, le soleil, l’air iodé des marais salants et les soins attentifs des frères améliorent la santé de beaucoup d’entre eux.

Sanatorium du Croisic au début du XXe siècle (Ordre Hospitalier de Saint Jean de Dieu, Paris)

70 ans de travaux !

Bâtiment reconstruit (Ordre Hospitalier de Saint Jean de Dieu, Paris)

Un à un, les bâtiments du casino sont démolis puis reconstruit et agrandis afin de recevoir toujours plus d’enfants dans des locaux parfaitement adaptés à leurs besoins. Mais en abattant le premier mur en 1899, les frères ignoraient que la dernière aile de l’établissement, celle de la chapelle, ne serait achevée qu’en 1967. Près de 70 ans de travaux, réalisés patiemment, malgré des interruptions régulières dues aux guerres, aux tempêtes et aux difficultés financières.

S’adapter aux nouveaux besoins

À partir des années 1950, le nombre d’enfants accueillis diminue et les séjours deviennent plus courts. Les frères comprennent alors que les services qu’ils proposent ne répondent plus aux besoins de leur époque : ils doivent reconvertir leur établissement. En 1975, celui-ci devient centre de réadaptation fonctionnelle pour jeunes gens de 12 à 40 ans, puis Maison d’accueil spécialisée et Foyer d’accueil occupationnel en 1990. Cette dernière reconversion nécessite des locaux adaptés. Or, une restructuration de si grande ampleur n’est pas envisageable dans ces bâtiments anciens. Pour le bien de leurs résidents, les frères sont donc contraints de prendre une douloureuse décision : se séparer de ce bel édifice qu’ils ont construit et façonné pendant près d’un siècle, pour bâtir un nouveau centre mieux adapté… de l’autre côté de la rue !

Recommencer de zéro ?

Nouveau centre, inauguré en 1997

Ce nouveau centre a déjà près de 25 ans. Il est spacieux et moderne, seule la statue de sainte Anne au milieu des bâtiments rappelle le passé centenaire de l’œuvre. Mais en s’installant dans ces nouveaux locaux, les frères ne repartent pas de zéro. Les bâtiments ont changé, l’hospitalité demeure. Comme le disait Frère Olivier Bonnaud, supérieur provincial au moment de leur construction, « cet événement ne s’inscrit pas comme une rupture dans l’histoire de cette œuvre, mais bien au contraire, il manifeste une réelle volonté de poursuivre, sans faillir, malgré les obstacles inhérents à toute entreprise, ce qui a été commencé il y a plus d’un siècle.  »

L’hospitalité demeure

Comme saint Jean de Dieu, les frères ont transféré leur hôpital lorsque celui-ci n’était plus adapté. Comme lui, ils se sont montrés créatifs, innovants, en bâtissant un nouvel établissement sur-mesure. Comme lui, ils ont toujours placé la personne accueillie au centre de leurs préoccupations, cherchant à répondre toujours mieux à ses besoins. Si les murs du nouveau centre du Croisic peinent à nous raconter son histoire, ils sont pourtant l’écrin d’une hospitalité plus de quatre fois centenaire mais toujours bien vivante, celle de saint Jean de Dieu.