
“Ce n’est pas la durée d’une présence qui en fait sa valeur”
- 13 novembre 2022
Archevêque d’Antanarivo depuis 2006, Mgr Odon Razanakolona était à Rome du 21 au 29 octobre derniers pour la visite Ad limina des évêques de la Conférence épiscopale malgache. Avant de rentrer sur la Grande ile, il en a profité pour rendre visite aux Frères de Saint Jean de Dieu en France. Rencontre.
Après de nombreux reports en raison de la pandémie de Covid, la visite Ad limina des évêques malgaches a enfin pu se dérouler. Qu’en retenez-vous ?
La dernière visite Ad limina remontait à sept ans et nous attendions, depuis la crise du Covid, le bon moment pour faire cette visite. Nous avions rendu nos rapports et étions donc prêts à venir les présenter à Rome. C’est la troisième fois que j’effectuais une visite Ad limina et ce qui m’a le plus marqué cette fois-ci, c’est qu’on nous a écoutés. D’habitude, chaque dicastère nous présentait la conclusion de nos rapports et nous écoutions. Là, ils nous ont dit “on vous écoute.” Cela nous a permis d’échanger, d’apporter des éclaircissements en lien avec nos rapports, de partager, tout simplement, entre frères. C’était bon. Je crois que la synodalité est passée par là aussi !
Quel est l’enjeu majeur auquel l’Eglise de Madagascar fait face aujourd’hui ?
C’est justement cet enjeu d’une plus grande synodalité, que nous vivons déjà fortement chez nous. En particulier entre prêtres et laïcs. Il faut savoir que l’histoire de l’Eglise de Madagascar est marquée par le rôle et l’action des laïcs puisqu’au moment du conflit entre l’Etat malgache et l’Etat français au XIXe siècle, ce sont deux laïcs qui ont pris la relève après le renvoi des missionnaires, pour animer la petite communauté chrétienne. Ils ont été des piliers de l’Eglise jusqu’au retour officiel des missionnaires, envoyant d’autres laïcs un peu partout dans le pays pour poursuivre la mission. Aujourd’hui encore, certaines de nos églises sont animées par des laïcs, alors que nous avons d’importantes vocations sacerdotales. Heureusement qu’ils sont là !
Quinze ans après leur arrivée à Madagascar, comment se sont intégrés les Frères de Saint Jean de Dieu ?
Ce n’est pas la durée d’une présence qui en fait sa valeur ! Nous avons la chance d’avoir deux communautés de Frères hospitaliers qui se distinguent par leurs actions dans le domaine de la santé, là où ils sont. Dans un foisonnement de congrégations religieuses, ils trouvent petit à petit leur place. Les gens commencent à les connaître, non seulement pour leurs activités, mais aussi pour leur vie communautaire et spirituelle. Je dois dire que de plus en plus les congrégations agissent en communion, entre elles et avec l’Eglise locale, et ça facilite beaucoup de choses. En vivant cette communion, les religieux se rendent présents dans la vie de l’Eglise et s’y impliquent de plus en plus. C’est un beau signal pour les vocations, car ils sont au milieu des gens. Et les gens les comprennent mieux.
Si saint Jean de Dieu naissait aujourd’hui à Madagascar, que ferait-il ?
Il serait le bienvenu ! Une grande majorité de la population est en difficulté, et la santé en particulier est un luxe. La pauvreté est là, il y a de la place pour tout le monde. Nous devons tous nous engager dans les trois grands thèmes que nous avons retenu de notre synode : l’éducation, la pauvreté et la globalisation.
Quel message souhaitez-vous laisser aux Frères de Saint Jean de Dieu avant de rentrer chez vous ?
Je suis venu ici pour découvrir de près la vie communautaire des Frères, et participer en particulier à leur vie spirituelle et fraternelle qui m’a édifié. Vivez du charisme de saint Jean de Dieu là où vous êtes !