Les artisans du renouveau


Hôtel-Dieu Marseille

Le 8 mars 1819, à l’hôtel-Dieu de Marseille, se forme un petit groupe d’infirmiers bénévoles qui décident de vivre en communauté et prennent le nom de Frères de Saint Jean de Dieu. Les bases sont posées, la restauration de l’Ordre en France peut commencer ! Mais comment s’est formé ce petit groupe et d’où leur est venue l’idée de restaurer l’Ordre Hospitalier de saint Jean de Dieu en France ?









Le projet du Frère Hilarion


Frère Hilarion

L’histoire commence avec Joseph-Xavier Tissot. Un personnage au parcours assez chaotique : étudiant en médecine avant d’être interné à l’hôpital de Charenton, puis entré en religion sous le nom de Frère Hilarion sans jamais vraiment appartenir à une congrégation. Au cours d’un séjour à la Trappe, il découvre la vie de saint Jean de Dieu et veut l’imiter. Soucieux du sort des malades mentaux, il fait une tentative de fondation d’un établissement pour aliénés en Corrèze, mais incapable de le gérer, c’est un échec. Il se retire alors dans un ermitage du petit village de Rochegrude, diocèse de Valence, où son projet va commencer à se dessiner.

Les encouragements du Père Vincent

A Rochegrude, Frère Hilarion côtoie le Père Vincent, curé de la paroisse, qui devient son directeur spirituel. Le Père Vincent avait une dévotion particulière pour saint Jean de Dieu et encourage activement Frère Hilarion et quelques paroissiens dans un grand projet : restaurer l’Ordre Hospitalier de Saint Jean de Dieu en France. Au début de l’année 1819, sur ses conseils, Frère Hilarion quitte Rochegrude avec deux compagnons pour se rendre plus au Sud afin d’y trouver un hôpital auquel proposer leurs services d’infirmiers bénévoles et ainsi concrétiser leur projet. Les trois hommes prennent donc la route, mendiant pour se nourrir, proposant leurs services dans les hôpitaux mais en vain. Ils arrivent finalement à Aix-en-Provence, devant l’hôtel-Dieu, où, en février 1819, ils font une rencontre décisive.

L’action de Paul de Magallon


Paul de Magallon

Devant cet hôpital, Frère Hilarion aborde un jeune aristocrate, ancien soldat de l’armée napoléonienne, qui venait, comme à son habitude, visiter les malades, en réfléchissant au sens à donner à sa vie maintenant qu’il avait quitté l’armée. Après une longue conversation, les deux hommes sont enchantés. Pour Paul de Magallon, tout s’éclaire, il a enfin trouvé ce que le Seigneur attend de lui. Il recommande Frère Hilarion à l’hôtel-Dieu de Marseille, permettant enfin aux trois voyageurs de commencer leur action auprès des malades et les y rejoint le jour de la Fête de saint Jean de Dieu, le 8 mars 1819. Ensemble, ils prennent l’habit religieux et Paul, sous le nom de Frère Jean de Dieu devient Frère Majeur de la communauté.

Par la suite, la restauration ne s’est pas faite en un jour. Reconnus par l’hôtel-Dieu de Marseille et par l’évêché, les frères ont dû écrire à Rome, au Supérieur général de l’Ordre Hospitalier de Saint Jean de Dieu, pour lui demander l’affiliation. Après avoir fait profession et devenant de plus en plus nombreux, ils quittèrent Marseille pour fonder leurs propres hôpitaux et ainsi avoir la liberté de s’occuper des malades à leur manière, à la manière de saint Jean de Dieu.

Quant à nos trois initiateurs de ce beau projet, chacun poursuivit la route qu’il s’était tracé.

Frère Jean de Dieu de Magallon mena à bien la restauration de l’Ordre en France jusqu’à la reconnaissance officielle de la province par Rome en 1853, en dépit de toutes les difficultés. Nommé quatre fois Supérieur provincial, il fonda cinq convents-hôpitaux à travers la France et fut même nommé assistant général à Rome, restant jusqu’à sa mort, en 1859, un exemple pour ses frères.

Frère Hilarion, lui, a rapidement quitté l’Ordre. Bouillonnant de projets, il est parti dans l’idée de restaurer un autre Ordre, voyagea beaucoup, écrivit des livres, quêta pour les pauvres, tenta de fonder des établissements pour aliénés et mourut à Paris en 1864.

Quant au Père Vincent, ce prêtre passionné par saint Jean de Dieu que nous avions laissé à Rochegrude, il a finalement quitté sa paroisse pour devenir lui aussi Frère de Saint Jean de Dieu. Sous le nom de Frère Vincent de Paul, il passa les 26 dernières années de sa vie en tant qu’aumônier de différentes maisons, soulageant les pauvres et les malades avec le plus grand dévouement.